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05/09/2023

Prix de transfert et déduction du crédit d’impôt recherche du prix de revient

Fiscalité des entreprises du patrimoine et des organismes sans but lucratif

En cette période de rentrée la thématique des subventions proposées par les Etats Unis d’Amérique en concurrence avec l’Union Européenne et entre les pays membres pour attirer des projets industriels de grande ampleur constitue un enjeu.

Dans ce registre, outre les différentes subventions classiques que chaque état est à même d’octroyer, la France dispose d’un avantage compétitif avec le crédit d’impôt recherche ("CIR"). Nul doute que cette compétition exacerbée entre états aura un impact sur l’appréciation des prix de transfert des entreprises dont la vérification s’inscrit déjà au cœur des futurs débats fiscaux.

Dans ce contexte, il n’est pas inutile de revenir sur les conclusions rendues par Madame Céline Guibé le 14 avril 2022 dans le cadre d’un pourvoi formé par l’Administration fiscale devant le Conseil d’Etat (n°455944) qui apporte un éclairage utile pour appréhender ces futurs débats.

L’Administration fiscale a contesté pendant plus de 10 ans les prix de transfert des sociétés françaises du groupe STMicroelectronics qui, pour maintenir la compétitivité de la R&D déployée en France, déduisaient les différentes formes de subventions dont elles bénéficiaient du prix de revient facturé à leur donneur d’ordre dans le cadre d’opérations de R&D qui leur étaient confiées.

Les sociétés de ce groupe déduisaient ainsi de ce prix de revient, auquel était naturellement appliqué un taux de marge, les subventions dont elles bénéficiaient, quelle que soit leur forme, qu’il s’agisse de subventions directes pour des projets de R&D identifiés et financés par l’Union Européenne et/ou la France ou de subventions indirectes par le biais du CIR pour les autres projets de R&D, déduction sans cesse contestée par l’Administration fiscale.

A la suite de plus de 25 décisions devant le Tribunal administratif de Montreuil et la Cour administrative d’appel de Versailles, puis de Paris, validant la position des sociétés du groupe, l’Administration fiscale avait tenté de porter le contentieux devant le Conseil d’Etat.

Le 4 avril 2022, le Conseil d’Etat refusa d’admettre le pourvoi formé par l’administration fiscale et dans ses conclusions, Madame Céline Guibé confirme que, quelle que soit la forme de la subvention dont bénéficie une entreprise dans le cadre de ses projets de R&D, c’est-à-dire qu’il s’agisse d’un versement direct ou du CIR, sa déduction du prix de revient de prestations de R&D qu’elle réalise et sur lequel elle applique une marge, ne constitue pas en soi un transfert de bénéfice.

En précisant que cette conclusion est fondée sur le fait que ces deux formes de financement viennent directement alléger le coût net des travaux de recherches de l’entreprise concernée, Madame Céline Guibé rappelle un des principes directeurs d’une politique des prix de transfert.

Ce faisant, elle remet accessoirement à sa juste place le panel de comparables, que l’Administration fiscale met systématiquement en avant parce qu’il est le fondement d’une dialectique du redressement bien rôdée : soit l’entreprise n’en dispose pas et elle est alors défaillante dans la démonstration du juste prix, soit elle en dispose et elle remet en question sa pertinence. Or, d’aucuns jugent le panel de comparables de moins en moins adapté, tant la variété des situations particulières et les ruptures économiques, technologiques et politiques se succèdent.

A cet égard, on relèvera que durant plus de 10 ans, dans chacune des décisions rendues par les différentes juridictions, l’Administration fiscale n’a jamais été en mesure de produire un panel de comparables jugé pertinent par ces dernières.

Charles Péguy écrivait : « Homère est nouveau ce matin et rien n'est peut-être aussi vieux que le journal d'aujourd'hui. ». Cette décision et les conclusions Madame Céline Guibé nous paraissent ramener un peu de raison en rappelant un principe essentiel et ouvrir des possibilités pour les entreprises de construire une politique de prix de transfert adaptée dans le contexte actuel de compétition exacerbée entre les états pour attirer sur leur territoire des projets industriels.

L’équipe fiscale d’Aklea, qui a accompagné le groupe STMicroelectronics dans ce contentieux, est à vos côtés pour mettre son expertise en matière de prix de transfert à votre service.

Un sujet porté par l'équipe Fiscalité des entreprises du patrimoine et des organismes sans but lucratif

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